Montaigne, des la toute premiere ligne de le introduction, precise de facon etonnante que le ?uvre est “de belle foi”, il ne ment pas. D’ailleurs il n’ecrit gui?re Afin de un simple lecteur ni pour une quelconque renommee mais Afin de sa famille. On voit une certaine agression envers le public, il n’a aucune consideration Afin de lui. Cela precise beaucoup des rapports qu’il veut entretenir avec lui, et aussi avec ses copains.
Texte de Au lecteur
Au Lecteur
C’est ici un livre de bonne foi, lecteur. Il t’avertit, des l’entree, que je ne m’y suis propose aucune fin, que domestique et privee. Je n’y ai eu nulle consideration de ton service, ni de ma gloire. Mes forces ne semblent pas capables tout d’un tel dessein. Je l’ai voue a la commodite particuliere de mes parents et amis : a ce que m’ayant perdu (ce qu’ils ont a faire bientot) ils y puissent retrouver aucuns traits de les conditions et humeurs, et que via votre moyen ils nourrissent, plus altiere et plus vive, la connaissance qu’ils ont eue de moi. Si c’eut ete pour rechercher la faveur du monde, J’me fusse mieux pare et me presenterais en une marche etudiee. Je veux qu’on m’y voie en ma facon simple, naturelle et ordinaire, sans contention et artifice : car c’est moi que je peins. Faire mes defauts s’y liront au vif, ainsi, ma forme naive, autant que la reverence publique me l’a permis. Que si j’eusse ete entre ces nations qu’on dit vivre i nouveau sous ma douce liberte des premieres lois de constitution, je t’assure que je m’y fusse fort volontiers peint tout entier, ainsi, tout nu. Ainsi, lecteur, j’suis moi-meme la matiere de mon livre : votre n’est jamais raison que tu emploies ton loisir en un thi?me si frivole et si vain. Adieu donc ; de Montaigne, votre premier de mars mil 5 cent quatre vingts.
Montaigne – Les Essais
Podcast de France inter sur Au lecteur, de Montaigne
¤ Dans J’ai premiere part “C’est ici. ” a “. tout d’un tel dessein.” : Montaigne s’adresse au lecteur ¤ Dans la deuxieme partie “Je l’ai voue. ” a “. qu’ils ont eue de moi.” : Montaigne declare qu’il destine cet ouvrage a ses proches ¤ Dans la troisieme part “Si c’eut ete Afin de. ” a “. et tout nu.” : peinture de lui-meme et limite a cette sincerite ¤ Dans la quatrieme part “Ainsi, lecteur. ” a “. ce premier de mars mil cinq cent quatre vingts.” : Montaigne congedie le public
I. Montaigne s’adresse au lecteur
De “C’est ici. ” a “. tout d’un tel dessein.”
Le lecteur reste directement interpelle et tutoye. Il va i?tre interpelle de facon imperative “t’avertit”, “lecteur”. Il va i?tre interpelle et mis a l’ecart. Montaigne declare qu’il n’a gui?re ecrit ses Essais pour le lecteur (“Je n’y ai eu nulle consideration de ton service”). Le projet de Montaigne parait etre defini negativement “ne … que”, “nulle … ni”. Montaigne explique qu’il ne reclame aucun commentaire ni jugement d’une part des lecteurs, puisque ce livre ne leur reste pas destine (“Je n’y ai eu nulle consideration de ton service”). Montaigne se devalorise ironiquement en declarant que celui-ci ne pourrait i?tre gui?re assez fort Afin de ecrire 1 livre Afin de tout lecteur (“Mes forces ne sont nullement capables d’un tel dessein”). Tout ceci est votre procede pour interpeller le lecteur et aiguiser sa curiosite car Montaigne en publiant ses Essais , veut evidemment toucher le environ lecteurs possible.
II. Montaigne declare que celui-ci destine cet ouvrage a ses amis
De “Je l’ai voue. ” a “. qu’ils ont eue de moi.”
Montaigne declare qu’il souhaite donc limiter ses lecteurs a ses copains (“mes parents et amis”). Cela donne une premiere justification a cette autobiographie : il souhaite lutter contre la mort. L’antithese entre “perdu” et “retrouver” met en valeur sa justification. En quelque sorte l’ecriture permettrait de survivre. Il se justifie une seconde fois en expliquant que celui-ci ne souhaite jamais que l’on ait une fausse image de lui. L’autobiographie, selon lui, met en jeu une communication entre les etres, il peut ainsi plus se faire connaitre, plus Realiser savoir votre que c’est vraiment. “plus altiere et plus vive”, il veut bien faire connaitre concernant lui, ainsi, l’anaphore de “plus” montre meme que votre ouvrage permettra a ses amis de mieux le connaitre. L’emploi du commentaire “vive” montre egalement que Montaigne considere que l’ecriture de ses Essais lui permettra en quelque sorte de survivre apres sa mort.
III. Peinture de lui-meme et limite a la sincerite